Partie 2 ~ 7e ciel
Bon. Tout n’avait pas été facile au début. Notamment pour leurs rythmes de vie si opposés l’un de l’autre, mais cela n’avait rien d’une surprise, il savait à quoi s’en tenir dès le début. Alors il y eut des concessions. Ce prix à payer n’était rien comparé au bonheur du couple. Il l’aimait comme un fou et sa flamme ne baissait pas d’intensité, son amour à elle enflait, enflait, jusqu’à rejoindre le sien.
Ils étaient sur un nuage...
Ses collègues au bureau lui tapaient dans le dos, un peu surpris, un peu jaloux peut-être, mais au fond drôlement contents pour lui. C'était un bon gars, toujours prêt à payer une tournée, raconter de bonnes blagues ou dépanner un pote. De plus, il savait rire de lui même. De l'avis général, il méritait bien ce qui lui arrivait.
Par contre, par respect pour lui, ils n'osèrent plus aller regarder sa compagne danser. Ce qui n'était bon ni pour la recette du café, ni pour Elle. Alors il les fit revenir et remarqua qu'ils ne se comportaient pas comme d'habitude, semblant tous quelque peu gênés. L'un d'eux lui demanda finalement :
- Mais ça ne te dérange pas tous ces mecs qui regardent ta femme?
Il sourit de toutes ses dents et prit un air rêveur en observant celle qui se mouvait sur la scène.
- Mais elle est belle ma femme, pourquoi ça m'embêterait? Tu sais quoi? Vous pouvez tous la regarder autant que vous voulez j'en ai rien à faire. Et tu sais pourquoi? Parce que le seul qu'elle regarde, c'est moi. Celui qu'elle embrasse, c'est moi. Celui avec qui elle est naturelle, c'est moi. Celui à qui elle sourit, c'est moi.
- Et celui avec qui elle passe les nuits, chanceux! lança un collègue aussitôt fusillé du regard par les autres.
Lui, la mine réjouie, lui donna une bourrade.
- Tu peux le dire : oui je suis chanceux. Je suis un homme comblé; alors je peux bien vous laisser la regarder un peu. Vous n'avez que ça, tandis que je l'ai elle. Et qu'elle m'a moi bien sûr.
- Je sais pas si elle est gagnante !
Cette réflexion déclencha un rire général. Il rit aussi.
Ses pensées dérivèrent vers leur première nuit...
Elle avait dû prendre les devants car lui n'osait pas. C'était tout de même un peu gênant comme situation : il ne pouvait décemment pas, comme ça, lui sauter dessus juste après une demande en mariage. Cela ne se faisait pas. Et elle aurait pu croire à une mascarade pour obtenir son corps, ce qui serait atroce. Non. Il ne voulait pas de ça. Mais elle le comprit de travers et crut qu'elle ne lui plaisait pas, ne lui faisait aucun effet. Comment pouvait elle l'espace d'une seconde penser une chose pareille? Ne pas lui plaire? Avec ce corps de déesse, cette opulente chevelure, ce regard malicieux et ces jambes interminables? Bien sûr qu'elle ne le laissait pas indifférent! Elle lui faisait beaucoup "d'effet", plus que ça, même. Seulement ce ne serait pas très gentleman de...
- Et me laisser frustrée, tu trouves ça gentleman, toi?
Avait elle demandé taquine, le regard brillant de malice et la main sur la hanche. Là, il n'avait plus su quoi dire, hésitant encore. Tout son être était en feu mais il ne se décidait pas de peur de commettre l'irréparable. Réalisant son réel embarras, touchée même par toute cette attention, elle craqua complètement. Se rapprochant de lui, elle colla ses lèvres tout près de son oreille, lui provoquant des frissons et lui susurra :
- Je me fiche d'être un gentleman moi. Tu n'as qu'à me laisser mener la danse ce soir...
La suite, pas la peine de la raconter : l'extase tout simplement. Au matin, épuisés et détendus, ils s'endormirent après la sonnerie de son réveil à lui. Il lui caressait les cheveux, respirait son parfum, la serrait dans ses bras. Elle était si jolie quand elle dormait! Le visage apaisé, un demi-sourire craquant, elle se serrait tout contre lui.
Ce matin-là, pour la première fois, il n'alla pas au bureau. Le bonheur.
Les mois puis les années passèrent dans la douceur, la tendresse et la passion. Il était bon et rassurant de les voir ensemble. Cette image adoucissait les humeurs, donnait un regain d'espoir à ceux qui n'avaient pas encore trouvé leur moitié.
Lui, si enthousiaste pour sa passion à elle l'avait entraînée sur de nouveaux chemins. Fini le petit café-concert miteux, elle dansait maintenant dans différents théâtres où le public payait pour la voir. Il s'était fait son "impresario" et elle était aux anges. De même qui lui du reste, car non seulement c'était bon pour son ego professionnel à elle, mais en plus elle n'avait plus besoin de travailler comme serveuse et avait donc plus de temps à la maison. Ses répertoires variaient et le subjuguaient toujours autant. Mais ce qu'il préférait c'étaient les fois où le plus souvent le dimanche, elle ne dansait que pour lui dans leur nid d'amour.
Un petit détail pourtant l'empêchait de savourer son bonheur à 100% : il lui réitérait une fois l'an sa demande en mariage mais elle s'obstinait à refuser. N'étaient ils pas parfaitement bien ainsi? Leur situation actuelle était idéale non? Pourquoi vouloir à tout prix se marier? Ce n'était qu'une formalité. Elle l'aimait et souhaiter rester pour toujours avec lui. N'était-ce donc pas suffisant, mon chéri? Vaincu, il laissait filer. Jusqu'à l'année suivante. Car alors, peut-être aurait-elle changé d'avis?
Mais il devait avouer qu'elle avait raison sur un point : rester pour toujours ensemble était suffisant. Et puis avoir des enfants aussi. Il avait envie d'avoir des enfants avec elle. Elle était d'accord du reste, et ils s'y attelaient gaiement. Oui, tout était pour le mieux! La félicité totale.
Et puis...